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DES CHIFFRES ET DES LETTRES

(Février 1995 - numéro 6)

 

En quatre classes

«A y bien réfléchir, on peut diviser l'humanité en quatre catégories qu'on a plus ou moins le temps d'aimer. Les amis. Les copains. Les relations. Les gens qu'on ne connaît pas.»

«Les amis se comptent sur les doigts de la main du baron Empain, voire de Django Reinhardt, pour les plus misanthropes (…).

«Les copains se comptent sur les doigts de la déesse Vishnou qui pouvait faire la vaisselle en applaudissant le crépuscule (..).

«Les relations se comptent sur les doigts de l'Armée rouge. Mais on sera bien venu de n'entretenir que les bonnes (..).»

«Les gens qu'on ne connaît pas, les doigts nous manquent pour les compter. D'ailleurs ils ne comptent pas. Il peut bien s'en massacrer, s'en engloutir, s'en génocider des mille et des cents chaque jour que Dieu fait (…). Il peut bien s'en tronçonner des wagons entiers, les gens qu'on ne connaît pas on s'en fout (…).»

«Je verrais bien une cinquième catégorie où s'inscrirait, unique, la femme qu'on aime sur le bout des doigts. Parce qu'on la connaît par cœur.»

 

Pierre Desproges
Chroniques de la haine ordinaire, Seuil, Point virgule,1987, p. 57-61
Texte proposé par Victor Descombres