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CHOSES VUES, CHOSES LUES, MISE A NU

(Novembre 1996 - numéro 11)

 

I: Naître ou ne pas naître

«Alors Fanny, ce troisième on le fait ou on le fait pas?»

Le journal La Croix du 23 août 1996 nous offre une bonne nouvelle: «La France assure le renouvellement des générations». «De 1976 au début des années 1990, l'indicateur conjoncturel de fécondité s'est stabilisé autour de 1,8 enfants par femme. Le passage de cet indice au-dessous du seuil de renouvellement des générations - 2,1 enfants par femme - a alarmé de nombreux démographes. […]. L'INSEE tempère cette inquiétude […]. En revanche l'INSEE reste prudent pour l'avenir. L'indice conjoncturel a de nouveau baissé au début des années 1990 (1,65 en 1993 et 1994)».

De la même manière, l'Express du 29 août 1996 titre à la page 44: «Natalité: devoir accompli» et d'ajouter «les natalistes qui, dans un manifeste récent (1), sommaient le gouvernement d'enrayer le vieillissement de la population française ont sans doute tort de s'affoler: pour l'heure (sic), selon les dernières analyses de l'INSEE, le remplacement des générations est assuré».

Tout cela n'est pas très clair. Et puis c'est tout de même affolant de ne pas savoir s'il faut s'affoler ou pas. Et Fanny dans tout cela? Et Marius, déjà reparti finir sa partie de cartes sans attendre que les experts aient donné leur… sentiment? Vous me direz qu'il aurait pu lire la prose, toujours didactique, de Michel Louis Lévy dans Population et Société. Mais Marius voudrait avoir plusieurs sons de cloches.

Nous donnerons la parole à qui voudra la prendre - dans l'esprit pénombresque - et en particulier, nous l'espérons à Michel Louis Lévy. Merci à tous ceux qui accepteront d'éclairer l'opinion de nos deux jeunes amis.

Vos papiers (et disquette) doivent nous parvenir avant le 31 janvier 1997 dernier délai, le cachet de la poste faisant foi.

Un prix d'une valeur inestimée récompensera le plus convainquant.

 

Victor Descombres

 

(1) L'Appel pour sauver l'avenir, SOS Jeunesse lancé par l'association Population et Avenir.

 

 

II: Décalage

27 septembre 1996. Sont rendues publiques les statistiques du chômage du mois d'août. En «données corrigées des variations saisonnières», le nombre des demandeurs d'emploi a progressé de 39'500. La France compte désormais 3'085'100 chômeurs, soit 5,3% de plus qu'il y a un an, 3'418'100 si l'on compte aussi ceux qui ont travaillé plus de 78 heures dans le mois. Les commentaires sont unanimes. L'économie française est en panne et la situation de l'emploi calamiteuse, cette progression mensuelle étant sans précédent depuis 1993. Le Monde précise toutefois que ces résultats doivent être interprétés avec prudence, car «les chiffres de juillet avaient été exceptionnellement bons, avec une baisse de 20'000, ce qui explique sans doute que ceux d'août soient exceptionnellement mauvais, la tendance moyenne se situant vraisemblablement entre les deux extrêmes.»

Ce même 27 septembre, m'arrive à la lecture le courrier commun du service comprenant La Lettre du Gouvernement datée du 13 septembre 1996. Sous le titre «La baisse du chômage en juillet est un encouragement à intensifier la lutte pour l'emploi», le zélé organe officiel mensuel souligne que le chômage a baissé de 0,7% en juillet et que le taux de chômage s'est «stabilisé» à 12,5% de la population active. Il poursuit: «comme l'a souligné le chef de l'Etat, ces chiffres doivent amener à redoubler d'énergie et d'optimisme, les efforts du gouvernement commencent en effet à porter leurs fruits. Nous sommes en train d'engranger les résultats d'une stratégie de la croissance en emploi, a affirmé le ministre du Travail et des Affaires sociales.» Le message gouvernemental est souligné par une citation du 30 août 1996 du même ministre, en encadré: "les chiffres du chômage sont un démenti à la morosité". Faut-il résumer le décalage ressenti ce jour-là (et que peuvent ressentir ceux qui sont privés d'emploi?) par la formule "tendances courtes, idées courtes", jouer au moraliste en dénonçant l'impudeur de la récupération de tout bon indice conjoncturel dont on connaît les limites, dans une vision politique à court terme, ou bien tout simplement s'étonner de l'incompétence des "professionnels" de la communication gouvernementale? Ce sont les mêmes conseillers, en effet, qui ont sans doute oublié, quelques jours plus tard, que l'annonce d'une baisse des impôts (sur cinq ans…) par le premier ministre s'effectuait juste avant que les contribuables ne doivent payer leur dernier tiers provisionnel, au moment où ils prenaient connaissance du montant de leur imposition 1996. En particulier, les contribuables apprenaient l'augmentation de leurs impôts locaux, pour Paris par exemple, de + 8,16% pour la taxe d'habitation, dont + 17,22% pour la part revenant à la Région (là où sont évoquées un certain nombre d'affaires concernant l'attribution de marchés publics…).

Décalage…

 

Jean-Paul Jean