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PAS MOYEN

Avril 2001 - numéro 25 [Table des matières]

 

Records

Un titre du Midi-Libre du 30 décembre 2000 me tire l’œil : " 2000 : la saison de la décennie ". Il s’agit de la saison touristique sur la façade méditerranéenne. D’abord, je me demande de quelle décennie il s’agit : a priori, ça serait toute période de dix ans chevauchant 2000. Comme l’article qui suit ne cite ni Nostradamus ni Madame Soleil, on comprend que c’est la décennie écoulée : 1991-2000. Faut-il alors comprendre que la fréquentation touristique a été plus haute qu’elle ne l’a jamais été depuis 1991, mais qu’elle avait été encore supérieure en 1990 ? Sinon, quel est l’intérêt de cette information, hormis l’amour des nombres ronds ?

Les journalistes aiment à sonner de la trompe lorsqu’ils ont une nouveauté à se mettre sous la plume. Sans doute aussi, parce que ça plaît à leurs lecteurs.

De ce point de vue, les séries temporelles sont une mine inépuisable de nouveauté. Naguère, un grand magasin parisien faisait sa publicité en affirmant qu’il s’y passait toujours quelque chose. Au grand bazar de la météo, de la politique et du sport, il se passe toujours quelque chose qui ne s’était jamais produit.

Mieux encore que l’économie et la politique, la météo est grande pourvoyeuse d’événements. Les séries de températures étant éminemment variables, c’est bien le diable si, sur les trois cent soixante cinq jours environ d’une année, on n’est pas souvent en position d’annoncer : " c’est la plus forte (ou, la plus basse) température observée un 28 mars depuis 12 (ou 35 ou 74 ou 126) ans. " La bourse ou les taux de change, comme les scores électoraux sont aussi une source inépuisable de records.

Cet éternel renouveau doit nous donner un sentiment de perpétuelle jouvence. Ça nourrit les journalistes et les conversations. En somme, ça crée du lien social !

Rien n’est moins nouveau que ce perpétuel renouvellement, auquel on ne devrait donc pas prêter tant d’attention. Car, quand quelque chose de vraiment nouveau survient, on met du temps pour s’en apercevoir, et, quand on en prend conscience, ce n’est déjà plus nouveau et n’offre donc plus d’intérêt.

 

Mélanie Leclair