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Espérance de vie, longévité, vie normale…

Au cours de l’émission Répliques du samedi 24 juin 2017, sur «  Le grand déménagement du monde  », Renaud Camus a cherché à illustrer la nocivité irrémédiable des chiffres par une comparaison entre l’espérance de vie et la longévité, bien supérieure, de diverses personnes. Ou le fait que certaines personnes vivent beaucoup plus longtemps que ce que cette espérance de vie prévoit. Il en déduit que les statistiques nous tromperaient. Cela peut arriver  ! Mais l’exemple choisi par Renaud Camus, qu’il s‘agisse de naïveté de sa part ou plus vraisemblablement de roublardise, n’est pas pertinent.

Ceci nous fournit l’occasion de corriger une erreur fréquente en rappelant la distinction entre trois notions, toutes trois fondées sur les conditions et connaissances actuelles, sans augurer des progrès ou des drames à venir.

La plus connue est l’espérance de vie à la naissance : actuellement, 79 ans pour les hommes et 85 ans pour les femmes, en France. Comment cette «  espérance  » est-elle calculée  ? Elle s’appuie sur des «  tables de mortalité  » : probabilités, à chaque âge, de mourir dans l’année.

Pour rassurer Renaud Camus, à supposer qu’il soit vraiment inquiet, une espérance de vie à la naissance de 79 ans ne signifie pas qu’un homme de 78 ans soit condamné à mourir dans l’année  !

Les tables de mortalité permettent aussi de calculer une deuxième notion : l’espérance de vie à un âge donné1. Par exemple, à 78 ans, un résident en France du sexe masculin survivra en moyenne 10 ans (si les conditions de mortalité actuelles se perpétuent) et pas seulement une année  ! S’agissant de moyennes, on peut évidemment espérer les dépasser ou craindre de ne pas les atteindre.

Autre notion, distincte des deux précédentes : la longévité potentielle. Actuellement de 122 ans, âge atteint par la Française Jeanne Calment. L’espoir éventuel, fondé sur un seul cas, d’atteindre cet âge, n’a rien à voir avec l’espérance de vie à la naissance ou à un âge donné, qui synthétise les récentes statistiques de mortalité.

Eh oui : il n’est pas certain que le chiffre soit le propre de l’homme mais cette invention humaine, sans prétendre résumer l’humain, peut être utile pour aider à le comprendre... et, parfois, aider à ne pas dire n’importe quoi en généralisant abusivement des impressions ou illusions diverses.

Alain Gély

1. Pour calculer l’espérance de vie selon le sexe, la date de naissance et le pays, voir par exemple : http://mon-convertisseur.fr/estimation-esperance-vie-residuelle.php